[Preview]Kingsound KS-H4

Jusqu’ici inconnue au bataillon, la marque chinoise Kingsound a surpris le marché du casque en lançant, il y a un an, des casques électrostatiques (les KS-H2 et KS-H3), allant ainsi chasser sur les terres du maître quasi incontesté dans ce domaine : Stax. Malgré des retours mitigés sur ces deux premiers casques, la marque réitère l’expérience et lance le KS-H4, un électrostatique…transportable ! Avec son petit amplificateur dédié, le M-03, la marque promet de profiter de la qualité de cette technologie en déplacement. Un bouleversement dans le monde du casque ?


Préambule

Avant toute chose, je tiens à remercier notre partenaire Audiophonics qui nous a confié l’ensemble Kingsound pendant trois semaines.

Cet article est une preview et non un test réel. En effet, basée sur une période d’écoute finalement assez courte et quasiment uniquement sur l’amplificateur transportable Kingsound M-03, je considère cette évaluation insuffisante pour se faire une réelle idée du potentiel du casque.

 

Présentation

Packaging

L’ensemble formé par le KS-H4 et son ampli, le M-03, est annoncé comme étant transportable et cela se confirme dès l’ouverture du paquet : en effet chacun des produits est fourni avec une pochette de transport rigide très pratique et à l’allure soignée. De l’extérieur elles restent très discrètes, celle du casque par exemple ressemble à une sacoche d’ordinateur portable classique (mais rigide, donc).

Kingsound 1

Elles sont aussi très bien pensées ; en particulier, l’intérieur de celle du casque est compartimentée via une mousse découpée afin de s’adapter aux usages et au matériel possédé par l’auditeur. Le compartiment dédié au casque reste fixe et maintient celui-ci pendant le transport, évitant toute casse. Au milieu du logement accueillant le casque, un second renferme le câble, amovible donc, qui y est soigneusement enroulé.

Kingsound 2

En dessous de l’emplacement du casque, un troisième compartiment peut s’ouvrir afin d’accueillir la pochette de l’amplificateur transportable, rassemblant ces deux éléments dans la même pochette pour le transport, ou peut simplement rester scellé si vous ne possédez pas le M-03.

La pochette de l’amplificateur est plus simple : d’un côté, un gros élastique maintient l’amplificateur en place, alors que de l’autre côté un filet permet de ranger le câble mini-jack vers mini-jack fourni. Ce câble présente une allure soignée avec une gaine tressée, à la couleur d’un goût certes particulier, mais qui semble solide et inspire confiance ce qui est suffisamment rare pour le noter.

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Le casque

Tout d’aluminium vêtu, sauf au niveau des charnières, le casque est assez joli. Le modèle testé est la version noire avec le contour des oreillettes jaune/doré mais le casque est également disponible en gris avec les contours rouges. Seul élément non peint : l’arceau supérieur qui conserve la couleur naturelle de l’aluminium, apportant un contraste de couleurs plutôt agréable à l’œil.

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Les pads et le bandeau sont en cuir, doux au toucher. Le bandeau reprend le système présent sur les casques de la marque AKG comme le K-701 : une bande placée à l’intérieur de celui-ci apparait et s’adapte automatiquement à la morphologie de la personne. Cela évite tout réglage manuel, et c’est de plus confortable. Ajoutez à cela un poids plume, aluminium oblige, ainsi qu’un niveau de serrage bien dosé et vous obtenez un casque très agréable à porter. Le Kingsound KS-H4 est un modèle de confort, il s’oublie rapidement une fois posé sur la tête. Etant habitué à des casques beaucoup plus lourds, comme les Audeze, je dois avouer que j’apprécie énormément.

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Une précision importante est à apporter concernant ce casque. Les lecteurs les plus attentifs auront remarqué que je n’ai jusqu’ici jamais employé le terme « nomade » pour qualifier le KS-H4, lui préférant le terme de transportable. Non, le KS-H4 n’est pas un casque nomade et cela pour plusieurs raisons. La première est que le casque est ouvert, très ouvert même, ne proposant aucune isolation sonore. Avec les Grado et les Audeze il fait partie des casques les plus ouverts que j’ai pu essayer jusqu’ici. Même en écoutant de la musique à un volume correct je parvenais à entendre distinctement les clics de souris. L’isolation du casque vers l’extérieur est également inexistante. Certes, la musique se partage, mais faites tout de même attention à vos voisins dans les transports en commun si vous souhaitez écouter du grindcore à 7 heures du matin…

La deuxième raison est la taille du casque. Le Kingsound est un casque full size et même si il est vrai qu’à l’époque des Beats et autres Bose, voir des casques imposants dans la rue ou les transports en commun n’est plus choquant pour personne, l’arceau métallique vous donnera des airs d’extraterrestre (et attention à ne pas servir de paratonnerre en cas d’orage).

Ce « non nomadisme » n’est pas un reproche, simplement un constat. N’espérez pas acheter un casque nomade pour écouter dans les transports ou au bureau. Maintenant que vous êtes prévenus, passons à l’amplificateur transportable.

L’amplificateur

L’amplificateur transportable M-03 est, d’après Kingsound, spécialement conçu pour aller avec le KS-H4. Commençons tout de suite avec un sujet qui fâche : le M-03 n’est pas plus nomade que son compagnon KS-H4. Avec ses 3 centimètres d’épaisseur et son poids de 430 grammes il ne manquera pas de déformer toutes vos poches.

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Pourtant, si on fait abstraction de son format et de son poids, il faut avouer que la volonté de le transporter partout est assez forte. En effet, le M-03 propose quelques éléments intéressants. Premièrement son autonomie est longue… très longue. Kingsound annonce une autonomie de 13h et, pour une fois, je dirai qu’ils sont en dessous de la réalité. Je ne suis pas un fanatique du chronomètre mais, pour vous donner un ordre d’idée, je ne l’ai rechargé qu’au début de la troisième semaine de test. C’est très impressionnant et appréciable. Deuxième point intéressant, à l’instar de l’Oppo HA-2, le M-03 propose une sortie USB permettant de recharger votre smartphone.

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Esthétiquement c’est une bonne brique : épaisse et rectangulaire, avec les bords arrondis donnant un semblant d’allure design. En bref, il n’est pas très beau, il est lourd et il possède un WAF à peu près nul. Pour rappel : ce n’est pas un ampli nomade et il peut se ranger (ou se cacher) dans une pochette donc ces points ne sont pas de réels défauts.

La connectique est complète : à l’avant on retrouve la prise 5 broches pour brancher le casque, une entrée et une sortie mini-jack, le M-03 faisant aussi amplificateur pour casques dynamiques. A l’arrière se situent la prise micro-USB permettant de recharger l’appareil et une autre prise USB pour charger son téléphone/DAP ou tout autre appareil se rechargeant en USB.

Le Son

Rentrons à présent dans le vif du sujet : le son.

Afin de coller aux orientations transportables de l’ensemble Kingsound, la source utilisée est un DAP Sony NW-ZX1. L’amplificateur a également été branché sur un DAC Meier DACCORD FF. Par pure conscience journalistique, le casque seul a aussi été testé sur un amplificateur STAX branché sur un DAC AMR DP-777. Pour information je possède des goûts musicaux variés, allant de la musique classique au métal extrême, en passant par l’acoustique et le jazz. J’écoute de tout sauf du rap et de l’électro.

Avant toute chose, commençons par écouter un peu de musique pour se donner une idée du rendu sonore général du dernier né de Kingsound. Normalement c’est dans le sens inverse, mais je suis un matheux et je n’aime pas mettre le résultat avant la démonstration.

Alcest – Ciel Errant
Alcest

Commençons tranquillement par un bon groupe de post-rock français. Le morceau débute par une introduction avec de la guitare au son clair, puis saturé, dont le rendu est plutôt agréable avec le Kingsound, même si on ressent immédiatement le manque de profondeur de la scène. Le kick de la batterie est en retrait par rapport aux deux guitares. Le casque dévoile donc dès le début une signature plutôt claire. La voix arrive et là, malheureusement c’est le drame. La voix de Neige, le chanteur, est voilée. Le côté en retrait du médium se faisait déjà deviner sur les guitares mais c’est beaucoup plus audible sur la voix. A 1 min52, la voix s’efface, on peut de nouveau se concentrer sur autre chose. Et, malheureusement bis, un autre problème apparaît : la séparation des instruments ne semble pas formidable, la scène est moins lisible et tout commence à se mélanger. A partir de la 4ème minute, les toms basses écrasent tout. C’est cependant moins gênant que la restitution de la voix du chanteur.

Une seule chanson et déjà plusieurs problèmes sont identifiés. Mais faisons une chose à la fois, continuons avec un morceau uniquement instrumental pour se focaliser sur la séparation des instruments.

Animal As Leader – CAFO
animal as leaders

L’introduction de cette chanson est complexe et constitue un bon test, tous les instruments semblant jouer dans leur coin (sauf qu’ils tombent ensemble à la fin). Cela permet de tester les capacités de résolution, de séparations des instruments ainsi que la vitesse du casque. Malheureusement ter, dès les premières mesures le KS-H4 se prend les pieds dans le tapis. La basse est trop présente et écrase tout le reste. La grosse caisse est quasiment inaudible, le casque semble manquer d’infra-grave. Les cymbales sont bien audibles en revanche, peut être trop, même si il faut tendre l’oreille pour entendre les ouvertures et fermetures de la charleston. La caisse claire sonne relativement bien avec une bonne attaque. On peine à distinguer les deux guitares 8 cordes. Globalement, quand tous les instruments jouent en même temps, tout se mélange, probablement à cause du cruel manque de profondeur. Passons à autre chose.

Gregory Privat – Four Chords
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Restons dans l’instrumental. Gregory Privat est un pianiste de jazz né en Martinique. Il mélange souvent jazz piano et musique des Caraïbes. Le piano va bien au Kingsound, et ce bien qu’un creux dans le bas médium se fasse ressentir. La signature claire du casque l’avantage sur cet instrument, même si on notera par ailleurs un pic dans les haut-médiums et aigus provoquant quelques sibilances de temps en temps. Le morceau avance et les percussions arrivent, très en retrait par rapport au piano mais leur impact est bien rendu. 5ème minute, la guitare électrique se présente. Il n’y a que 3 instruments, le piano censé être au premier plan, la guitare et un peu de percus ; pourtant la guitare et le piano se mélangent tout de même.

Jean Rondeau – Lute Suite No. 2 in C Minor, BWV 997
j rondeau bach

Un dernier morceau instrumental avant d’attaquer les voix avec du clavecin. Le clavecin convient parfaitement à la signature claire du casque. Les attaques sont franches. Ce n’est pas parfait évidemment, le manque de profondeur se fait encore sentir. Couplé à la réverbération présente dans l’enregistrement, la faible profondeur rend la scène un peu étrange. Le niveau de détails n’est pas non plus extraordinaire, les bruits mécaniques du clavecin, audibles avec d’autres casques comme le Hifiman HE-400S, sont ici quasiment absents. Autre point que je n’ai pas soulevé jusqu’ici car c’est une question de goûts, je trouve l’interprétation du Kingsound froide : ça manque de vie, l’instrument manque de présence et les notes manquent de poids. Bref je m’ennuie un peu. Mais c’est chipoter : globalement le Kingsound s’en sort bien sur du clavecin.

Newton Faulkner- I Need Something
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L’introduction à la guitare acoustique rend bien, la signature claire met bien en avant cet instrument. Par contre, les impressions d’écoutes sur le morceau d’Alcest sont confirmées et même renforcées car l’auditeur peut plus facilement se focaliser sur la voix. Le morceau est plus simple que celui d’Alcest : Faulkner est seul avec sa guitare, le mixage met la voix en avant et, à nouveau, celle-ci est complètement voilée. Tout le grain de la voix est absent, le timbre semble avoir changé et cela rend le son nasal. C’est dommage car, comme indiqué au début, la guitare est bien rendue, mais il est impossible de passer outre le rendu de la voix. Tentons d’écouter une voix de femme.

Nina Simone – Feeling Good
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Le Kingsound s’en sort mieux sur les voix de femmes et cela se sent dès les premières secondes. La voix de Nina est peut-être encore un peu basse pour que cela se ressente réellement mais le voile, clairement audible sur le morceau de Faulkner, est moins perceptible ici. Le haut médium du Kingsound est bon. C’est clairement plus écoutable. Un peu plus de textures rendrait cela meilleur mais je dois avouer que l’interprétation du Kingsound sur les voix féminines et plus que correcte.

Il y aurait beaucoup d’autres morceaux à mettre comme du Snarky Puppy, du Berlioz ou du Pagan’s Mind mais au final ce sont toujours les même choses qui en ressortent. Il est donc temps de faire le bilan de ces quelques écoutes

Signature

La signature du casque est étrange : elle est en V, mais un V avec la jambe gauche tronquée. Elle semble donc être chaude mais avec peu de grave et sans sub… Alors oui, aux premiers abords, le Kingsound sonne clair, mais c’est au prix de nombreux creux dans la courbe de fréquences.

Infra-grave et grave

L’infra-grave est quasiment inexistant sur le Kingsound. D’après les caractéristiques techniques, le casque descend jusqu’à 6Hz mais à l’écoute il me semble qu’il n’y a rien en dessous de 60Hz. A côté de cela, le grave est peu présent et plutôt brouillon. Il semble souvent empiéter sur le reste du spectre (comme dans l’écoute de CAFO, où la basse masquait les autres instruments). Je sais que cela peut parait contradictoire avec le « grave peu présent » énoncé plus tôt mais, en fonction de la musique (si celle-ci contient beaucoup de bas médium et de médium) le grave peut être proéminent. Cependant, malgré une certaine rondeur dans le grave, il faut reconnaitre une grande qualité à ce casque : son dynamisme. Le grave est rond mais les attaques sont franches. Que ce soit sur les grosses caisses ou des simples percussions, les attaques sont bien restituées.

Medium

Le médium est probablement la plage la plus problématique sur le Kingsound. Un creux est audible dans les bas-médium et un pic est présent dans les haut-médiums, qui eux sont de bonne qualité. Ajoutez à cela un médium sec et vous obtenez une restitution des voix catastrophique. C’est particulièrement audible sur les voix d’hommes, souffrant fortement du manque de bas médium. Le rendu des voix de femmes est meilleur, boosté par le pic dans les haut-médium / aigus. Dans les deux cas, un léger son nasillard se fait entendre. J’ai trouvé les faiblesses de ce médium moins gênantes sur les instruments.

Aigus

Les aigus sont fins, détaillés et en avant. Il y a un léger manque d’extension dans le haut du spectre mais rien de dramatique. C’est un des gros points forts du casque. En revanche, attention si vous êtes sensibles aux aigus, de légères sibilances sont parfois gênantes.

Soundstage

La scène sonore est relativement large mais manque sérieusement de profondeur. Toute la scène semble écrasée sur un seul plan située à 10 centimètres de l’auditeur, nuisant ainsi à la séparation des instruments. Sans qu’il présente une latéralisation aussi prononcée que celle d’un AKG K-701 (car on entend tout de même des sons au milieu), ne vous attendez pas à une scène « 3D » avec le Kingsound. La navigation entre la gauche et la droite est bonne cependant.

Conclusion

Au vu des différents constats de cette preview il serait facile de conclure « le casque est mauvais, passez votre chemin ». La vérité est plus complexe que cela. En effet il faut reconnaitre des qualités dans ce casque comme une bonne vitesse permettant d’entendre des attaques franches et précises et un haut-medium/aigu de bonne qualité. J’ai particulièrement apprécié son écoute sur du clavecin, du piano et de la guitare acoustique. Mais il faut tout de même garder son prix en tête. Pour 899€ (prix du casque seul, auquel il faut ajouter le prix de l’ampli) la concurrence est rude et le Kingsound souffre de gros problèmes impardonnables à ce niveau, comme une très mauvaise séparation des instruments et une signature étrange avec un médium voilé. Les Hifiman HE400S et Sennheiser HD6x0 apporteront plus pour un prix environ 3 fois moindre.

Amateurs de casques funs ? le Kingsound n’est pas pour vous malgré une signature qui semble être en V, probablement à cause du manque d’extension et de textures dans le grave. Au contraire, le Kingsound manque de fun, j’ai trouvé les écoutes ennuyeuses alors que je ne suis pas un amateur de casques fun avec des grosses signatures en V (j’ai possédé pendant longtemps un HD800). A côté de cela, le casque est confortable et le packaging est soigné.

Ceci-dit, j’ai tout de même envie de finir cette preview sur une note d’espoir : le KS-H4 est seulement le troisième casque de Kingsound. Rome ne s’est pas faite en un jour, la technologie est difficile à maîtriser correctement. Je trouve intéressant de voir des marques tenter le pari de l’électrostatique et oser faire face au maître de la discipline, Stax. Kingsound essaie même d’innover en voulant rendre l’électrostatique portable. Les prochains produits de la marque sont donc à suivre de près.

5 thoughts on “[Preview]Kingsound KS-H4”

  1. Encore une belle lecture, rendue possible par une belle écriture, qui parfait notre connaissance théorique (on ne peut pas toujours tester soi-même tous les casques 😉 ). Merci, et beau boulot !

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